Miroslav Radman
Biologiste moléculaire Université René-Descartes
-Personnellement, je ne vois que du bonheur à imaginer une vie productive sur cent, cent vingt ans, etc.
Du bonheur au niveau personnel, au niveau social, et du profit pour la société.
Mais je vois aussi un danger.
Imaginons que ça marche, que ce soit le résultat de recherches qui ont coûté très cher et qu'on brevette ça.
Le jour va arriver, peut-être dans dix ans, où seulement les riches pourront s'acheter l'élixir de jouvence parce qu'il est très cher, que les recherches ont coûté cher et qu'on est restés dans cette logique.
Alors là, je peux imaginer une situation qui est la rupture véritable.
Je l'imagine comme ça.
J'imagine un milliardaire qui achète cet élixir très cher pour les membres de sa famille mais aussi pour son chien, qu'il aime beaucoup, son chat, etc.
Et un kilomètre plus loin, en même temps, il y a un bébé humain qui est en train de mourir parce que les parents n'ont pas assez d'argent pour acheter le traitement médical.
Je crois qu'à ce moment-là, quelque chose d'important, d'immense, pourrait éclater dans la tête des gens, qui vont se dire que, finalement, à côté de toutes les inégalités sur des choses pas importantes, la voiture, la nourriture, la maison, etc., il y en a une seule qui soit vraiment importante dans la vie, c'est la vie même, la peur de la mort.
Or, devant la mort, on est encore égaux, aujourd'hui.
Qu'on soit un milliardaire, comme Steve Jobs, mort du cancer, ou un pauvre clochard mort du cancer.
Au moment où on va enlever cette égalité fondamentale humaine devant la mort, que se passera-t-il ?
Est-ce que les gens pourront encore soutenir l'injustice finale et totale, l'injustice ultime qui est celle devant la mort ?
"Je suis riche, je peux vivre trois cents ans, tu es pauvre, meurs à 30 ans." Je crois que si ça arrive, ça sera le début d'une véritable révolution car il s'agit de la chose la plus importante.