Bonjour et bienvenue à la Cité des sciences et de l’industrie pour ce nouveau numéro du Journal des sciences. Au sommaire cette semaine :
- Une intelligence artificielle capable de prédire l’avenir
- Une peau robotique sensible à la douleur
- Une enquête scientifique sur la mort de Robert Kennedy
- Et la fin du mystère concernant l’augmentation de température de la Lune
Simulation prédictive
Profiter des services d’un robot réalisant nos souhaits avant même que nous le demandions ? Peut-être pas si utopique que cela : des chercheurs viennent de mettre au point un programme capable d’anticiper avec précision les comportements humains avec plusieurs minutes d’avance.
Une machine intelligente capable d’anticiper votre prochain mouvement quelques minutes à l’avance… c’est maintenant une réalité.
À partir de vidéos culinaires, les chercheurs allemands ont appris à un programme à reconnaître une vingtaine d’actions réalisées par des personnes préparant une recette, comme couper une tomate, ajouter du sel, cuire un œuf, retourner une crêpe… Pas si facile pour une intelligence artificielle étant donné la variété des recettes et donc des séquences à reconnaître !
Les scientifiques ont ensuite testé plusieurs versions du programme en soumettant à la machine le début de séquences filmées. Puis ils ont évalué leurs réponses.
Pour l’instant, la meilleure version du programme arrive à prévoir, sans se tromper, une action allant jusqu’à 3 minutes dans le futur. Elle n’y parvient cependant que dans 15 % des cas. Un long chemin reste donc à parcourir pour aboutir à un système réellement efficace !
Robert Kennedy, une mort évitable ?
Le 5 juin 1968, Robert Kennedy est assassiné alors qu’il vient de célébrer sa victoire aux primaires démocrates en Californie. 50 ans plus tard, une équipe de chercheurs américains de l’université de Duke s’est penchée sur les soins dont il a bénéficié à l’époque, se demandant si la médecine actuelle aurait pu le sauver.
Descendant de la scène de l’Ambassador Hotel, à Los Angeles , Robert F. Kennedy, sénateur démocrate de New York et favori de la prochaine élection présidentielle, est touché à trois reprises par des coups de feu, mais une seule de ces blessures s’avèrera mortelle. Pour la première fois, 5 médecins de l’université de Duke ont travaillé sur l’analyse des blessures du sénateur et le traitement qu’il a reçu durant les 26 heures qui ont précédé sa mort.
Les médecins ont analysé les traitements utilisés à l’époque et les ont comparés à ceux d’aujourd’hui. La balle fatale, tirée à bout portant par Sirhan Sirhan, l’assassin d’origine Transjordanienne, a perforé la tête de Kennedy, endommageant le lobe occipital et le cervelet.
Emmené en salle d’opération du Good Samaritan Hospital c’est grâce à une craniotomie, une opération encore réalisée aujourd’hui visant à retirer une partie de la voûte crânienne pour pouvoir intervenir directement sur le cerveau, que l’homme a pu regagner une activité motrice. Mais 12 heures après l’intervention, la pression intracérébrale du sénateur a augmenté, et son électroencéphalogramme est devenu plat. Robert Kennedy est déclaré mort à 1 h 44.
En 2018, Robert Kennedy aurait bénéficié tout d’abord d’une tomographie, un procédé d’imagerie médicale permettant d’obtenir des images en coupe, et d’une artériographie, une radiographie d’une ou de plusieurs artères après injection d’un produit opaque aux rayons X. Une craniotomie aurait également été conduite, mais l’équipe médicale bénéficierait d’un microscope opératoire dont l’utilisation était très réduite à l’époque.
En réalité, malgré les avancées en imagerie médicale, en chirurgie ou en anesthésie, c’est la nature de l’impact qui a eu raison du cadet Kennedy.
« J’ai mal au capteur »
Se brûler ou se piquer un doigt, rien de plus banal ! Ça l’est moins lorsqu’il s’agit d’une prothèse de main !Des chercheurs en robotique viennent de présenter une prothèse capable de redonner le sens de la douleur aux patients amputés, et cela revêt de véritables avantages au quotidien.
La nociception, c’est-à-dire la perception de la douleur, nous aide à identifier les dangers, et donc, à les éviter. Mais les personnes amputées d’une main et dotées d’une prothèse se retrouvent privées d’informations en provenance de cette partie du corps, extrêmement riche en nocicepteurs, les récepteurs à la douleur. La première conséquence est un risque accru d’endommager la prothèse, en l’exposant à des objets brûlants ou abrasifs.
Une équipe internationale de roboticiens de la Johns Hopkins School of Medicine et de l’Université nationale de Singapour vient de mettre au point une prothèse capable de transmettre des signaux sensoriels, allant des sensations non douloureuses, permettant par exemple de détecter la forme d’un objet, aux sensations de douleur modérée. Cette approche, définissant un continuum de sensations, semble offrir un meilleur réalisme, mais demande un entraînement énorme.
Pour le dispositif sensoriel, les chercheurs ont conçu un derme électronique multicouche, inspiré de l’organisation biologique naturelle des récepteurs de la main.
Il faut ensuite câbler ce système sensoriel artificiel sur le système nerveux du patient. Le participant de l’étude a effectué plus de 25 heures de cartographie sensorielle, pour bien localiser les zones cérébrales associées à sa main perdue. Il a également subi plus de 150 essais de stimulation sensorielle pour calibrer l’intensité des messages nerveux envoyés par la prothèse.
Enfin, cette main bionique est dotée d’une capacité réflexe grâce à un algorithme associé. Si l’objet provoque un seuil de douleur trop important, la main lâche l’objet avant même que le patient en ait émis l’ordre depuis son cerveau.
Coup de chaud après Apollo
Durant les années 70, les instruments déposés sur la Lune par les missions Apollo ont mesuré une hausse de la température du sol lunaire. Comment expliquer ce qui pourrait être un « réchauffement climatique lunaire » ? Près de 40 ans après, les chercheurs ont enfin la réponse à cette question.
Lors des missions Apollo 15 (en 1971) et Apollo 17 (en 1972), les astronautes ont installé des instruments scientifiques qui ont pu mesurer durant plus de 5 ans l’évolution de la température du sol lunaire. Très curieusement, les instruments ont noté durant cette période une augmentation de température d’environ 2 °C. Comme la Terre, La Lune connaîtrait-elle un réchauffement climatique ?
Durant plusieurs décennies, cette question est restée sans réponse, car, comme une grande partie des données recueillies lors des missions Apollo – ces enregistrements ont été égarés.
Il aura fallu attendre près de 40 ans pour que des chercheurs américains remettent la main sur les bandes magnétiques contenant les données, et pour qu’une explication puisse enfin être proposée.
Selon les scientifiques, la lune n’a pas connu de réchauffement climatique, et ce sont les astronautes eux-mêmes qui sont à l’origine de cette augmentation de température. En foulant le sol lunaire, les astronautes ont en effet soulevé une fine couche de poussière, laissant derrière eux des traces beaucoup plus sombres, ce que confirment les images prises encore récemment par la sonde Lunar Reconnaissance Orbiter. Un sol plus sombre absorbe plus de lumière du soleil, ce qui le rend plus chaud. La modélisation montre même que la perturbation locale de température est à même de se propager jusqu’à 1 mètre de profondeur.
Si la Lune n’a pas connu de réchauffement climatique au cours des années 70, ces nouveaux résultats montrent en tout cas qu’il est quasi impossible de déployer des astronautes ou des instruments sur la Lune sans perturber son environnement de surface. Une leçon qui pourrait être utile lors des futures missions lunaires.
Voilà, ce journal est terminé. On se retrouve vendredi prochain pour un nouveau numéro du journal des sciences. En attendant, bonne semaine à tous.