Le traitement du VIH a progressé depuis ses débuts dans les années 90, à un tel point que les médecins envisagent de le simplifier. Des stratégies d'allègement thérapeutique sont à l'étude dont le traitement intermittent 4 jours sur 7 qui a récemment prouvé son innocuité. Pour en parler, nous avons rencontré Vincent Leclerc, séropositif et militant dans l'association AIDES, et l'infectiologue Pierre de Truchis, l'un des médecins responsables de cette étude nommée "l'essai quatuor". Depuis 2011, je prends un traitement 7 jours par semaine. Je dois le prendre pendant le repas. C'est contraignant car je ne mange pas à heure fixe. Tous les jours, je dois réfléchir à quel moment je prends mon traitement, je dois penser à l'avoir avec moi pour ne pas sauter de prises. Si je peux éviter cette logistique le week-end, c'est assez reposant. Suite à l'essai pilote qui s'appelait l'essai 4D qui démontrait que cette stratégie 4 jours sur 7 était faisable, on a pu monter l'essai quatuor qui a été soutenu par l'ANRS, Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites. Cet essai a inclus 640 patients dans une cinquantaine de centres cliniques en France avec deux groupes de patients. La moitié des patients passait à 4 jours sur 7, l'autre moitié restait pendant un an à 7 jours sur 7 avant de passer à leur tour à 4 jours sur 7. C'est essaie quatuor est aussi très intéressant car on a inclus des patients qui avaient toutes les trithérapies actuelles. C'est une stratégie presque universelle car elle s'intéresse à toutes les trithérapies actuellement prises. Le résultat principal qui apparaît, c'est qu'il y a une non-infériorité de résultat dans les deux bras. La stratégie 4 jours sur 7 est aussi efficace à un an que la stratégie jusqu'ici reconnue, 7 jours sur 7 comme préconisée dans l'ensemble du monde. Il y a très peu d'échappements virologiques, il y en a autant dans le bras 7 jours sur 7 que dans le bras 4 jours sur 7. Dans les deux bras, il y a moins de 2 % d'échappement virologique après un an. Il y a plusieurs bénéfices à l'allègement thérapeutique. Les personnes bénéficient d'une meilleure qualité de vie. Il y a également un bénéfice sur le corps car on est exposé sur le long terme à des molécules un peu toxiques qui ont un impact sur les organes, sur la fatigue. Pour des personnes qui vont prendre un traitement toute leur vie, la réduction de l'exposition à des produits toxiques est appelée l'épargne de toxicité. C'est déjà ça de gagné sur le corps. Dans les bénéfices, il faut rajouter le problème du coût. C'est quand même significatif puisque 42 % de coûts médicamenteux en moins, c'est important actuellement au Nord mais aussi dans les pays du Sud si ça peut y être appliqué. C'est particulièrement important dans les pays où les moyens financiers pour l'accès aux médicaments sont limités. Les résultats de l'essai quatuor ont été publiés en juillet 2019. À l'hôpital de Garches où exerce Pierre de Truchis, de plus en plus de patients veulent passer à l'allègement thérapeutique. Il y a des critères précis pour pouvoir faire cet allègement, Le patient doit avoir une charge virale indétectable depuis plus d'un an. Et il faut aussi que le patient ne présente pas de résistance ou de virus résistant au traitement en cours. On voit avec les patients en fonction de leur histoire thérapeutique quel type d'allègement on peut leur proposer, soit ce traitement intermittent 4 jours sur 7, soit une autre stratégie actuellement à l'étude un peu partout dans le monde qui est de passer d'une trithérapie à une bithérapie, donc de trois à deux médicaments pour un traitement d'entretien également un peu allégé. J'espère que les résultats confirmés de l'essai quatuor vont permettre quand même que l'on se pose la question dans de plus en plus de centres et de pays, et que finalement ce soit une stratégie qui puisse être utilisable plus largement.
Réalisation :
Maya Chebl, Anaïs Poncet
Production :
leblob.fr
Année de production :
2019
Durée :
5min10
Accessibilité :
sous-titres français