C’est ce qu’on appelle le trimorphisme : le fait que chez certaines espèces, un sexe existe sous trois formes différentes. C’est le cas de Forsteropsalis pureora, une espèce néo-zélandaise de faucheux. La pince du mâle alpha, appelée chélicère, est courte et puissante : il s’en sert pour saisir et immobiliser ses adversaires afin d’accéder aux femelles. Le chélicère du mâle bêta est plus long, et possède en conséquence une prise plus faible, ce qui le rend moins disposé à l’affrontement. Enfin, le mâle gamma évite complètement la confrontation : non seulement il est 7 fois plus petit que ses congénères, mais en plus son chélicère est atrophié et inutile au combat. Ce qui ne l’empêche pas de se reproduire et de continuer à co-exister avec les autres mâles. Pour cela, il emploie simplement une stratégie différente : il se met activement à la recherche de femelles isolées, afin de se reproduire avec elles tout en esquivant de potentiels rivaux. Et ce que vient de découvrir une nouvelle étude menée à l’université d’Auckland, c’est comment advient cette différenciation. En effet, aucun faucheux n'est génétiquement destiné à devenir un de ces trois mâles. En revanche, l’étude constate que 82,6 % des mâles gammas observés ont perdu au moins une patte au cours de leur croissance, contre 9,5 % des autres mâles. Autrement dit, un juvénile mutilé a 45 fois plus de chance de devenir un mâle gamma une fois adulte. Chez les faucheux, les pattes sont cruciales pour la chasse. L’étude théorise donc que d’un point de vue évolutif, il est trop coûteux pour ces individus de consacrer leur énergie, durement gagnée, à développer et entretenir des armes destinées à la reproduction. D’où l’émergence d’une autre stratégie. Ici, les contraintes environnementales se révèlent une fois de plus être le facteur évolutif déterminant. Et bien que pendant longtemps, la domination a été mis au premier plan en ce qui concerne la réussite sexuelle cette découverte offre un nouvel exemple du fait que la réalité est bien plus nuancée. Y compris au sein d’une même espèce.
Réalisation :
Clément Lepape
Production :
Universcience
Année de production :
2023
Durée :
1min58
Accessibilité :
sous-titres français