Les antibiotiques : un mal viral
Une étude réalisée aux États-Unis pointe les risques accrus de contamination par un virus après un traitement antibiotique. Ce n'est pas une bonne nouvelle, puisque la prescription d’antibiotiques est toujours en progression dans le monde.
Nicolas Bott - Publié le
Quand on vous dit que « les antibiotiques, ce n’est pas automatique »... Des chercheurs américains viennent de montrer qu’un traitement par un ou plusieurs antibiotiques pouvait augmenter significativement les risques de contracter une maladie grave d’origine virale. Pire, un tel traitement peut avoir des conséquences néfastes si le sujet est effectivement contaminé par un virus.
Les flavivirus – une catégorie particulière de virus incluant le virus du Nil occidental, le virus de la dengue et le virus Zika – sont contractés chaque année par environ 400 millions de personnes dans le monde et peuvent entraîner des maladies graves. Jusqu’à présent, la contribution des facteurs environnementaux à la gravité des maladies dues aux flavivirus restait mal caractérisée. Parmi eux figurent les antibiotiques, très utilisés de nos jours pour lutter contre les maladies bactériennes : sur une année aux États-Unis, 80 % des patients se sont vu prescrire un traitement antibiotique, et la tendance est à la hausse.
Pour évaluer les effets collatéraux des antibiotiques sur les virus, des chercheurs de la Washington University School of Medicine de Saint Louis ont administré à des souris un mélange de quatre antibiotiques (vancomycine, néomycine, ampicilline et métronidazole) puis leur ont inoculé un flavivirus.
Système immunitaire au ralenti
Cette expérience, présentée dans la revue Cell Reports, montre que les souris traitées par le mélange d’antibiotiques ont un plus grand risque de contracter un flavivirus que les souris non traitées. Elle montre également que le flavivirus est plus virulent qu’en l’absence de traitement antibiotique. En effet, la charge virale (le nombre de copies d’un virus dans un volume de fluide donné) du virus du Nil occidental et de la dengue est plus grande pour les souris traitées par les antibiotiques, et ce au niveau du tractus gastro-intestinal et du cerveau.
La plus grande vulnérabilité au virus et l'aggravation de la virulence virale semblent trouver leur origine dans le fait que le traitement antibiotique s’attaque à notre système immunitaire, et notamment aux lymphocytes T. La baisse du nombre de lymphocytes liée à l'administration de ces antibiotiques favoriserait l'entrée de flavivirus. Par ailleurs, la perturbation du microbiome des souris persiste plusieurs jours après l'arrêt du traitement antibiotique ; le sujet traité serait ainsi particulièrement vulnérable à une infection virale durant toute cette période.
Bien que d’autres tests soient nécessaires pour confirmer ces résultats chez les humains, cette étude relance le débat sur l’utilisation, souvent abusive, des antibiotiques et sur la nécessité d’une régulation de leur prescription.