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Des scientifiques ont pu dater à l'an 1021 la présence de Vikings sur le continent nord-américain après leur traversée de l'Atlantique © AFP/Archives Mychele Daniau

Des scientifiques ont pu dater précisément, à l’an 1021, la présence de Vikings sur le continent nord-américain après leur traversée de l’Atlantique, grâce à un rayonnement cosmique daté, et dont ils ont détecté la trace dans des morceaux de bois sur le site. On sait depuis longtemps que les marins scandinaves ont été les premiers Européens à débarquer là, autour de l’an 1 000, bien avant Christophe Colomb, qui touchera terre plus au sud et presque cinq siècles plus tard. À ce jour, le seul site connu de leur occupation reste l’Anse aux Meadows, une baie à l’extrême nord de l’île de Terre-Neuve, où subsistent les fondations de huit constructions avec des charpentes de bois. Mais comme le remarque l’étude parue dans Nature mercredi, les datations traditionnelles au carbone-14 réalisées le siècle dernier sont plus qu’imprécises, s’étendant sur plus de 250 ans. Or tout indique une occupation brève et sporadique de l’endroit, selon les vestiges archéologiques et les « Sagas », ces textes semi-légendaires narrant les épopées des Vikings.

L’équipe menée par Michael Dee et Margot Kuitems, respectivement professeur de chronologie isotopique et archéologue au Centre de recherche isotopique de l’Université néerlandaise de Groningue, a contourné l’obstacle avec une méthode originale. La Terre est soumise en permanence à des rayonnements cosmiques, « qui produisent continuellement du carbone-14 (une forme plus lourde et beaucoup plus rare que l’atome de carbone) dans la haute atmosphère », explique Margot Kuitems. Cette forme de carbone va « entrer dans le cycle du carbone, qui est absorbé par les plantes avec la photosynthèse ». Parfois, le rayonnement est beaucoup plus puissant : ces « événements » de rayonnement cosmique élèvent brusquement le taux de carbone-14 dans l’atmosphère.

Tempête solaire

Une étude japonaise a isolé deux tels « événements », en 775 et en 993, dont la trace subsiste dans des arbres dont l’âge était bien connu. La brusque élévation du carbone-14 se retrouvait aux dates en question dans leurs cernes de croissance, ces cercles que l’on observe sur un tronc coupé et qui aident à déterminer l’âge de l’arbre.

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Reconstitution d’un bâtiment datant de l’époque viking, adjacent au site de L’Anse aux Meadows © Glenn Nagel Photography

L’équipe de Margot Kuitems a cherché, à l’aide d’un spectromètre de masse, la trace de l’évènement de 993 dans trois échantillons de morceaux de bois prélevés sur le site de l’Anse aux Meadows. Des experts canadiens avaient déterminé que ces morceaux y avaient été travaillés par les occupants avec des outils de fer. « Quand nous avons mesuré la concentration en carbone-14 dans une série de cernes, nous avons trouvé une brusque élévation sur l’un d’eux, et nous étions certains alors qu’elle correspondait à l’année 993 », raconte la scientifique. Il a suffit alors de compter le nombre de cernes entre le cerne de « l’évènement cosmique » et le dernier situé avant l’écorce, pour déterminer la date à laquelle l’arbre a été abattu.

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Image au microscope d’un fragment de bois provenant des couches nordiques de L’Anse aux Meadows © Petra Doeve

Réponse : l’an 1021. La mesure a fonctionné pour deux morceaux de bois, dont les scientifiques ont même pu préciser que l’un appartenait à un arbre abattu au printemps, et l’autre à l’été-automne. Le Centre de recherche isotopique est en pointe sur cette méthode originale de datation archéologique. Il a signé une première étude sur le sujet en 2020, en datant précisément une structure archéologique dans le sud de la Sibérie, à l’aide de l’évènement cosmique de 775. Selon Mme Kuitems, il y a aujourd’hui un « consensus » pour expliquer ces pics de rayonnement cosmique par un « évènement solaire, comme une tempête solaire ». Un autre pic survenu en l’an 660 a été récemment confirmé, et pourrait à son tour servir de « marqueur » temporel, grâce à l’amélioration permanente de la précision des spectromètres de masse.