Test imminent d’une voile solaire « pour voguer parmi les étoiles »
Publié le - par le blob avec l'AFP
Dans quelques jours, une fusée Falcon Heavy de SpaceX va lancer depuis la Floride un satellite de la taille d’un pain et équipé d’une immense voile en polyester brillant : une « voile solaire », son unique moyen de propulsion. Le concept alimente les rêves d’astronomes depuis des décennies et n’a quasiment été jamais réalisé. L’idée semble folle : propulser des vaisseaux dans le vide spatial sans moteur, ni carburant, ni panneaux solaires, par la seule pression des insaisissables photons du Soleil. L’appareil qui sera lancé lundi, baptisé LightSail 2, a été développé par la Planetary Society, une organisation américaine de promotion de l’exploration spatiale, cofondée par l’astronome Carl Sagan en 1980. « Au XVIIe siècle, Johannes Kepler évoquait l’idée de voguer parmi les étoiles », dit à l’AFP Bill Nye, le patron de la Planetary Society, connu aux États-Unis comme le « Science Guy » (le scientifique), d’après l’émission pour enfants qu’il a animée dans les années 1990. « Les étoiles ont toute cette énergie, il se disait qu’on pouvait peut-être la dompter. Il se trouve qu’il avait raison. Ce n’était pas que de la poésie ».
Une voile solaire n’a rien de high-tech. C’est un grand carré de film très fin, très léger et réfléchissant, en l’occurrence 32 mètres carrés de Mylar, une marque de polyester commercialisée depuis les années 1950. Une fois déployée, la toile est un piège à photons. « C’est de l’énergie pure. Quand ils rebondissent sur quelque chose, ils transfèrent leur énergie à cette chose. Plus le vaisseau est grand et brillant, plus il est poussé », explique Bill Nye. La poussée fournie par les photons est infime… mais elle est continue. « Une fois en orbite, vous ne tomberez jamais en panne de carburant », dit Bill Nye. Les Japonais avaient réussi en 2010 à lancer la voile solaire Ikaros. Mais les autres agences spatiales ne sont jamais parvenues à vraiment tester le concept. « C’est une idée romantique dont l’heure est enfin venue », veut croire Bill Nye. « On espère que la technologie fera des émules ».
Énergie permanente
LightSail 2 a coûté sept millions de dollars. En 2015, LightSail 1 avait été lancé, mais la mission, de quelques jours, avait subi des problèmes et ne visait qu’à tester le déploiement de la voile. « Nous voulons démocratiser l’exploration spatiale », poursuit Bill Nye. Il invite universités et entreprises à reprendre la technologie.
Après le lancement prévu lundi depuis le centre spatial Kennedy, des tubes télescopiques en métal déplieront quatre triangles de voile, qui formeront un grand carré. Pour cette démonstration, des panneaux solaires alimenteront d’autres fonctions du satellite. La voile solaire restera en orbite autour de la Terre et, si tout va bien, elle haussera progressivement son altitude grâce à la pression des radiations solaires. À quoi ces voiles solaires pourraient-elles servir à l’avenir ? Bill Nye explique qu’elles seraient utiles pour aller très, très loin, au-delà de notre système solaire, car le vaisseau, s’il sera forcément plus lent au départ que s’il était équipé d’un moteur, accélérera en permanence et atteindra in fine des vitesses extraordinaires. L’autre intérêt serait de maintenir une sonde à un point stationnaire dans l’espace, ce qui nécessite des corrections permanentes. Par exemple un télescope qui surveillerait l’arrivée d’astéroïdes dans les alentours de la Terre, ou un satellite fixe au-dessus du pôle Nord de la Terre. « Il faudrait d’énormes quantités de carburant pour rester stationnaire pendant 10 ans », dit le scientifique. Les photons, à l’inverse, ne s’arrêtent jamais. En prime, dit Bill Nye, « vous pourrez voir LightSail 2 depuis le sol ». À l’œil nu.