Premier feu vert de l’Assemblée à un texte pour concilier numérique et environnement
Publié le - par LeBlob.fr, avec l’AFP
L’Assemblée nationale a approuvé jeudi à l’unanimité un texte visant à concilier développement du numérique et environnement, après un compromis sur une redevance pour les smartphones d’occasion, objet de vives tensions entre mondes de la culture et de l’industrie.
Les députés ont validé en première lecture en fin de soirée la proposition de loi sur « la réduction de l’empreinte environnementale du numérique » par 40 voix pour et aucune contre. Le texte doit maintenant retourner au Sénat, d’où il provient à l’origine. Ce compromis, issu d’amendements du gouvernement et de la majorité, prévoit que les téléphones d’occasion reconditionnés seront soumis à la « rémunération pour copie privée » (RCP), mais à un taux « spécifique et différencié » par rapport aux appareils neufs, tenant compte notamment de leur ancienneté. Les entreprises du secteur social et solidaire spécialisées dans ce reconditionnement en seront quant à elles exemptées, un point sensible pour de nombreux députés.
La ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, s’est félicitée d’une « solution gagnant-gagnant » pour les artistes et la filière économique. La perspective de voir cette loi exonérer les téléphones portables reconditionnés de cette redevance avait provoqué un tollé dans le monde culturel, qui y a vu une possible brèche dans un dispositif important de soutien aux artistes.
Créée en 1985, cette redevance s’applique aux fabricants d’appareils permettant de copier des œuvres culturelles. La RCP a généré 273 millions d’euros – l’équivalent de 7 % du budget du ministère de la Culture – en 2020 au profit des ayants droit et de projets culturels comme les festivals. À l’inverse, les entreprises du secteur souhaitaient cette exemption, estimant que cette redevance, si elle était pérennisée dans la loi, pourrait casser le dynamisme d’une filière fortement créatrice d’emplois, notamment dans l’économie solidaire. Le secteur du reconditionnement a représenté 15 % des ventes de téléphones en France en 2020.
La proposition de loi émane à l’origine du Sénat, qui l’a déjà approuvée en première lecture. Mais plusieurs sénateurs, dont le rapporteur du texte Guillaume Chevrollier, ont publié jeudi dans le JDD une tribune réclamant avec vigueur l’exonération de cette redevance pour les appareils de seconde main, laissant augurer de nouveaux débats sur ce point en deuxième lecture à la chambre haute.
« Angle mort »
La proposition comprend de nombreuses mesures visant en particulier à soutenir le recyclage et le réemploi des appareils numériques (smartphones, ordinateurs, tablettes, etc.) pour réduire leur impact sur l’environnement. « Il ne faut pas opposer deux transitions (écologique et numérique) mais faire en sorte qu’elles se nourrissent », a plaidé dans l’hémicycle le secrétaire d’État au numérique, Cédric O. « Angle mort des politiques environnementales », la pollution numérique « va s’imposer comme une problématique centrale des prochaines années », a souligné le rapporteur au Palais Bourbon, Vincent Thiébaut (LREM).
Selon les travaux d’une mission d’information sénatoriale, si rien n’est fait, le numérique serait à l’horizon 2040 à l’origine de 24 millions de tonnes équivalents carbone, soit environ 7 % des émissions de la France, contre 2 % aujourd’hui. Smartphones, tablettes et autres ordinateurs seraient responsables de près de 70 % de l’impact du numérique.
Le texte propose notamment la création d’un « observatoire des impacts environnementaux du numérique » afin d’établir des données plus précises sur cette problématique complexe. Car s’ils sont énergivores et soumis à un renouvellement rapide, les appareils numériques permettent aussi de remplacer des déplacements encore plus générateurs de CO2.
Le texte veut inciter enfants, étudiants et professionnels à la « sobriété numérique » ou encore promouvoir des centres de données et réseaux moins gourmands en électricité. Parmi les autres mesures proposées : renforcer la lutte contre l’obsolescence programmée des logiciels.