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Une vue aérienne du laboratoire P4 de Wuhan, le 17 avril 2020, en Chine © AFP Hector Retamal

Au sommet d’une colline à Wuhan, un laboratoire de virologie conçu avec l’aide de la France nourrit les soupçons américains sur l’origine du Covid-19, apparu dans cette métropole du centre de la Chine.

Selon la plupart des scientifiques, le nouveau coronavirus a probablement été transmis à l’homme depuis un animal. Un marché de la ville a été incriminé car il aurait vendu des animaux sauvages vivants. Mais l’existence à quelques kilomètres de là d’un Institut de virologie alimente depuis des mois les hypothèses d’une fuite du SARS-CoV-2 depuis ces installations sensibles.

A la suite d’articles de presse, le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a évoqué cette semaine une « enquête » pour creuser cette théorie, qui ne s’appuie pour l’instant sur rien de tangible.

Voici les principales questions sur l’Institut de virologie de Wuhan. 

Quel est ce site ?

Selon le quotidien Washington Post, l’ambassade des Etats-Unis à Pékin, après plusieurs visites de l’institut, a alerté en 2018 les autorités américaines sur des mesures de sécurité apparemment insuffisantes dans un laboratoire qui étudiait les coronavirus issus de chauves-souris.

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Une employée du laboratoire P4 de Wuhan, en Chine, le 23 février 2017 © AFP/Archives Johannes Eisele

La chaîne américaine Fox News, citant « plusieurs sources » anonymes, a incriminé le laboratoire P4 (pour pathogène de classe 4) du site. Il s’agit d’une installation de très haute sécurité, qui héberge les souches les plus dangereuses des virus connus — comme Ebola.

Ce lieu ultrasensible a été réalisé avec la collaboration de la France. Il permet de mener des recherches de pointe. Ambition : réagir plus rapidement à l’apparition de maladies infectieuses. D’un coût d’environ 40 millions d’euros, le laboratoire a été financé par la Chine. Les chercheurs y travaillent en confinement absolu. Il existe moins d’une trentaine de P4 dans le monde, dont la moitié aux Etats-Unis. L’Institut de virologie de Wuhan possède par ailleurs la plus grande collection de souches de virus en Asie, avec 1500 spécimens différents, selon son site internet.

Bien que la presse américaine évoque à chaque fois le P4, les germes moins pathogènes comme les coronavirus sont en théorie plutôt étudiés dans les P3, un type de laboratoire dont dispose également l’institut. Interrogé, l’institut a refusé de répondre aux questions de l’AFP. Le chercheur français qui y travaille n’a pas voulu non plus s’exprimer, invoquant son « devoir de réserve ».

L’AFP n’est donc pas en mesure de confirmer formellement que des coronavirus ont bien été étudiés avant l’épidémie dans ces laboratoires.

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Des chercheurs dans le laboratoire P4 de Wuhan en Chine, le 23 février 2017 © AFP/Archives Johannes Eisele

Est-ce la source du SARS-CoV-2 ?

Rien ne permet de le dire. Le Washington Post et Fox News citent des sources anonymes. Ces dernières font part de leur inquiétude quant à une potentielle fuite accidentelle du virus.

Selon la chaîne de télévision, le « patient zéro » à l’origine de l’épidémie pourrait être un employé de l’institut, contaminé, qui aurait ensuite diffusé sans le vouloir l’agent pathogène ailleurs à Wuhan.

Interrogé sur cette hypothèse, le président américain Donald Trump a déclaré entendre « de plus en plus cette histoire ». D’après lui, elle fait actuellement l’objet d’un « examen très approfondi » de Washington.

Plusieurs théories, plus ou moins exubérantes, ont fleuri ces derniers mois sur internet pour incriminer ce laboratoire. L’institut avait publié en février un communiqué démentant les premières rumeurs.

Il avait également déclaré avoir reçu dès le 30 décembre des échantillons du virus alors inconnu qui circulait à Wuhan (identifié ensuite comme le SARS-CoV-2), avoir séquencé son génome le 2 janvier puis avoir transmis ces informations à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) le 11 janvier. L’OMS avait effectivement indiqué avoir reçu la séquence du génome le 11 janvier de la Chine.

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Des chercheurs dans le laboratoire P4 de Wuhan, en Chine, le 23 février 2017 © AFP/Archives Johannes Eisele

Un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Zhao Lijian, a rejeté vendredi les accusations américaines visant l’institut.

Que disent les scientifiques ?

De l’avis de nombreux chercheurs, le nouveau coronavirus est sans doute né chez la chauve-souris. Ils pensent toutefois qu’il est passé par une autre espèce avant de se transmettre à l’homme. Des scientifiques chinois ont affirmé que cet animal intermédiaire pourrait être le pangolin, petit mammifère menacé d’extinction car exploité en raison de ses écailles.

Seulement voilà : des études publiées par d’autres chercheurs chinois dans des revues scientifiques réputées affirment que le premier patient connu n’a pas fréquenté le marché de Wuhan incriminé.

« L’origine de l’épidémie est toujours une question en suspens », déclare à l’AFP Filippa Lentzos, chercheuse en biosécurité au King’s College de Londres. Rien ne vient accréditer l’hypothèse d’une fuite de virus depuis un laboratoire et il n’existe « aucune vraie preuve » que le nouveau coronavirus provienne bien du marché de Wuhan, souligne-t-elle.