Face au tabou de la ménopause, un centre dédié unique en son genre
Publié le - par Le blob.fr, avec l'AFP
Face au tabou qui entoure encore aujourd’hui la ménopause, phénomène physiologique qui touche pourtant toutes les femmes, un centre unique en son genre lutte à Toulouse contre le manque récurrent d’informations. « Les douleurs articulaires sont un symptôme très classique du début de la ménopause. Or, moins d’une femme sur deux va spontanément rattacher ce symptôme à la ménopause ». L’exemple donné par la professeure Florence Trémollières frappe et illustre l’une des principales missions de l’institution que cette gynécologue et endocrinologue dirige depuis 2011 : renseigner pour aider.
« J’ai des patientes qui viennent de Strasbourg, de Lille, de Brest, parce qu’elles ne trouvent aucun médecin qui soit à même de répondre à leurs questions », soupire la directrice du centre de ménopause du CHU de Toulouse, le seul du genre entièrement dédié à la question dans l’Hexagone.
En mai, Emmanuel Macron avait pensé à elle pour diriger une future mission parlementaire sur la ménopause, un sujet, disait-il dans le magazine Elle, dont « on s’est aperçu qu’on (le) connaissait très, très mal ». Le projet de mission parlementaire est aujourd’hui « au point mort » du fait des turbulences politiques, selon une source proche du dossier, mais les patientes, elles, continuent d’avoir besoin d’aide.
Batterie de questions
Autour de 50 ans, les femmes cessent d’avoir leurs règles : leurs ovaires ne produisent plus d’hormones (oestrogènes et progestérone) et ne délivrent plus d’ovules à intervalle régulier. C’est la ménopause, et y faire face peut relever de l’épreuve. Le corps qui change, l’impression de bascule vers la vieillesse, le tout encore entouré d’un certain tabou.
Sous des néons fatigués, elles sont deux à attendre, ce matin à 7 h 45, d’être reçues par Christelle Moreau, l’infirmière du centre. Armée d’une batterie de questions, cette dernière cherche d’abord à identifier les patientes auxquelles la ménopause fait courir un risque santé accru. Car s’il est une évolution normale du corps féminin, le phénomène n’en comporte pas moins son lot de problèmes, dont les plus connus sont les bouffées de chaleur. Plus grave, la ménopause accroît le risque de pathologies comme les maladies cardiovasculaires ou l’ostéoporose, réduction de la densité des os accentuant leur fragilité. D’où l’insistance de l’infirmière concernant d’éventuelles fractures subies par ses patientes. Face à elle, Julie Bonjour est un cas d’école : elle s’est cassé trois fois les chevilles en cinq ans à peine. « Vous fumez ? », poursuit Mme Moreau. « Oui », répond la patiente, 46 ans, directrice des études d’un lycée de la banlieue toulousaine, qui confesse « une quinzaine de cigarettes par jour ».
Traitement hormonal
« Ce serait bien d’arrêter, car cela a un impact sur les os », reprend l’infirmière. La ménopause n’étant pas une maladie, il n’y a pas de remède. Mais les femmes ménopausées peuvent suivre un traitement hormonal pour prendre le relais des ovaires, surtout quand ceux-ci arrêtent de fonctionner prématurément. C’est le cas de Kelly Garcia, 43 ans aujourd’hui, mais qui n’en avait que 30 lorsqu’une chimiothérapie a provoqué une « insuffisance ovarienne prématurée ». « Les femmes sont programmées à recevoir des hormones jusqu’à la cinquantaine, donc si vous êtes ménopausée avant 40 ans, ça devient une maladie, et comme toute maladie, ça doit se traiter », explique Mme Trémollières, rappelant que la ménopause prématurée peut par ailleurs accroître les risques d’infarctus et d’Alzheimer.
L’avantage du centre de ménopause est qu’après une prise de sang chez l’infirmière, les patientes n’ont, dans un ballet bien rodé, qu’à traverser le couloir pour atteindre la salle d’ostéodensitométrie, nom barbare de l’examen visant à déterminer la densité des os. Habituée des lieux, Kelly Garcia s’y glisse et s’allonge sur le dos tandis qu’un bras robotique scanne son rachis lombaire (le bas de la colonne vertébrale) et son col du fémur, très vulnérables aux fractures. « D’autres villes n’ont pas cette chance-là » d’avoir un centre de ménopause. Et, s’inquiète-t-elle, « certaines patientes se retrouvent complètement démunies face aux symptômes qu’elles peuvent avoir ».