Cancer du sein : après 75 ans, le risque est toujours là
Publié le - par le blob avec l’AFP
Trop peu de femmes continuent à réaliser un dépistage du cancer du sein après 75 ans, pensant à tort qu’il y a moins de risques passé cet âge, s’alarment des gynécologues, pour qui un meilleur suivi éviterait des centaines de décès chaque année.
Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent et le plus mortel chez les femmes, avec 59 000 nouveaux cas par an et près de 12 000 décès en France. Or si les plus de 74 ans représentent le quart de ces nouveaux cas (13 600), elles comptent pour près de la moitié des décès, en raison notamment de diagnostics plus tardifs, observe Carole Mathelin, chef du service de sénologie au Centre hospitalier régional universitaire de Strasbourg. « Le cancer du sein de la femme âgée est un problème de santé publique », qui va « être amplifié dans les années qui viennent » sans « modifications de nos pratiques », s’inquiète-t-elle.
Trop de cancers dans cette tranche d’âge sont détectés à un stade avancé (tumeur de taille importante, atteinte des ganglions ou même métastases). Cette situation dérive de trois idées reçues, selon la responsable de la commission sénologie du Collège national des gynécologues et obstétriciens (CNGOF) : « puisqu’il n’y a plus de dépistage organisé après 75 ans, c’est qu’il n’y a plus de risque », « les cancers du sein de la femme âgée sont moins graves » et « les femmes atteintes meurent d’autres maladies avant que le cancer n’ait le temps de se développer ». Selon les projections, alors que le nombre de nouveaux cancers devrait reculer légèrement chez les femmes de moins de 70 ans d’ici 2040 (-5 %), il pourrait augmenter de 50 % dans la tranche d’âge supérieure, à la faveur du vieillissement de la population, estime le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC/OMS).
« Trop vieilles pour ça ? »
Actuellement, dans le cadre du dépistage organisé, toutes les femmes entre 50 et 74 ans sont invitées à réaliser une mammographie tous les deux ans pour détecter une éventuelle tumeur – et tous les ans pour celles qui présentent des risques accrus de développer un cancer du sein. Ces convocations cessant une fois l’âge limite atteint, beaucoup de femmes pensent, à tort, qu’il y a ensuite moins de risque de développer un cancer du sein, tandis que du côté du corps médical persiste l’idée qu’elles sont « trop vieilles pour qu’on les embête avec ça », déplore le CNGOF. Si cette maxime peut valoir pour des femmes très âgées ou ayant déjà d’autres pathologies très lourdes, l’allongement de la durée de vie fait que l’examen clinique régulier (palpation) et la mammographie conservent leur pertinence pour les femmes ayant encore plusieurs années d’espérance de vie, souligne la société savante des gynécologues-obstétriciens. Augmenter l’âge limite du dépistage organisé ne serait pas forcément pertinent en termes d’efficacité – et serait par ailleurs très coûteux –, mais le CNGOF, en partenariat avec la Ligue contre le cancer, veut sensibiliser patientes et médecins à la nécessité de poursuivre la surveillance sur une base individuelle. Dans le cadre d’une campagne d’information, les deux organisations vont notamment envoyer aux médecins généralistes une affiche avec le slogan « Trop vieille pour ça ? Seuls les autres le croient ».
Le Dr Jean-Yves Seror, radiologue à Paris et membre de la commission sénologie du CNGOF, appelle aussi de ses vœux une information officielle plus précise sur la persistance du risque de cancer. Il regrette que, aujourd’hui, à l’occasion de leur dernière convocation pour le dépistage organisé, les femmes concernées reçoivent un courrier de l’Institut national du cancer (INCa) stipulant qu'« après 74 ans, vous ne recevrez plus d’invitation régulière de notre part » et les invitant à se rapprocher de leur médecin traitant pour « déterminer la modalité de surveillance la plus adaptée ».