2022, année d’intempéries record dans l’hémisphère nord
Publié le - par LeBlob.fr, avec l’AFP
Inondations meurtrières au Pakistan, sécheresses et canicules historiques en Chine et en Europe, pluies diluviennes aux Etats-Unis : d’un bout à l’autre de l’hémisphère nord, les calamités naturelles de l’été 2022 ont matérialisé la réalité du réchauffement climatique pour des milliards de personnes. « Cet été nous enseigne que nous sommes bien en plein dans la crise climatique et que les répercussions sont là, tout autour de nous, souligne le climatologue Stefan Rahmstorf. Nous nous dirigeons vers une catastrophe climatique à l’échelle planétaire si nous n’agissons pas avec rapidité et détermination ».
De fait, la chronique des évènements météo extrêmes n’a connu aucun répit : dès le printemps sont apparues les cartes météo cramoisies de l’Inde, écrasée sous une canicule aussi intense que précoce, souvent au-dessus de 45 °C ; en juin, un « dôme de chaleur » enveloppait 120 millions d’Américains, suivi d’un cortège d’orages et d’inondations, dévastant le célèbre parc Yellowstone. Puis vinrent les incendies de forêt géants en Espagne et au Portugal, la chute meurtrière d’un glacier en Italie, ou encore la sécheresse historique sur la moitié de la Chine, vidant l’emblématique Yangtsé, vitale source d’eau potable et d’électricité.
S’il est trop tôt pour attribuer au réchauffement climatique tel ou tel phénomène, leur accumulation est conforme aux prévisions. « L’augmentation de la température mondiale causée par l’utilisation des énergies fossiles a été prédite correctement depuis les années 1970 », rappelle le Pr Rahmstorf, de l’Institut de Potsdam pour la recherche sur l’impact du climat (PIK). Les canicules se répètent, plus longues, plus chaudes, et « l’ampleur du phénomène correspond à ce qui était prévu au niveau mondial », tout comme l’augmentation des précipitations extrêmes et des sécheresses, « prédite il y a trois décennies ».
Toutefois, « l’Europe est un point chaud de canicule, présentant des tendances à la hausse trois à quatre fois plus rapides que le reste des latitudes moyennes du nord ». Au Royaume-Uni, la barre des 40 °C a été franchie pour la première fois cet été, quand la côte atlantique française pulvérisait parfois ses records de +4 ou +5 °C. « On peut se demander si la sécheresse qui a sévi dans l’hémisphère nord en 2022 peut figurer parmi les plus graves de l’histoire moderne par son ampleur et son intensité », affirme à l’AFP Omar Baddour, expert à l’Organisation météorologique mondiale (OMM), qui en prépare une évaluation scientifique pour la COP27 en novembre en Egypte.
Les effets de la chaleur et de la sécheresse se sont souvent cumulés. Or chaque degré Celsius de réchauffement de la planète équivaut à +7 % d’évaporation d’eau dans l’atmosphère, selon les experts climats de l’ONU (Giec).
Non sans conséquences, à tous les niveaux : au Pakistan, les moussons cataclysmiques ont fait plus de 1100 morts, noyé un tiers du pays, détruit les récoltes et frappé plus de 33 millions d’habitants. La Chine, subissant son été le plus chaud depuis six décennies, a augmenté sa production de charbon, très émetteur de gaz à effet de serre, pour pallier l’arrêt de ses barrages hydroélectriques.
En Europe, la végétation extrêmement sèche s’est embrasée avec facilité dans plusieurs pays, des champs de maïs en France ont grillé sur pieds tandis que les feuilles mortes jonchaient les rues de Londres dès le mois d’août.
L’été 2022, le plus frais du reste de notre vie ? « Non, nous aurons des étés plus frais que 2022, assure le climatologue Jean Jouzel, mais ces étés chauds deviendront de plus en plus fréquents » et « vers 2040-2050, l’été 2022 deviendra la norme ». Pour autant, « ce qu’il faut, c’est laisser l’espoir aux gens, aux jeunes : comment fait-on pour effectivement respecter la neutralité carbone en 2050 ? », a lancé le scientifique jeudi sur BFMTV.
Pour y parvenir, l’été infernal a-t-il au moins le mérite de réveiller les consciences ? « Ce n’est pas parce qu’on doutait de la réalité du réchauffement climatique qu’on n’a pas agi, et ce n’est pas parce qu’on le voit qu’on va se mettre à agir : en matière environnementale, il faut déconnecter conscience et action », met en garde le géographe du CNRS Xavier Arnauld de Sartre. Lui pointe surtout « un manque de volonté ».