Nébuleuse d’Orion
On a parfois des satisfactions inattendues en regardant le ciel.
Un de ces derniers mois de janvier j’ai observé la nébuleuse d’Orion, ce gigantesque nuage de gaz qui orne le ciel d’hivers. Rien d’original à ça et je n’étais pas le seul. Mais ce soir-là, l’image dans mon télescope ne bougeait pas et l’air sec et froid maintenait la pollution lumineuse à un niveau raisonnable. Durant près de deux heures, j’ai observé, cherché, vérifié et dessiné. La région centrale de la nébuleuse était brillante et les volutes de gaz se détachaient, encadrant le trapèze, petit amas d’étoiles jeunes nées de la nébuleuse.
Ma satisfaction n’était pas dans la découverte de ces détails, mais surtout dans le fait que je les retrouvais, après les avoir vu sur les dessins des astronomes du 19éme siècle.
Ce soir derrière mon télescope, m’accompagnaient tous ceux qui pendant des années, cherchant des changements, avaient intensément et précisément cartographié la plus belle nébuleuse du ciel. Vers 1880 la photo a remplacé le dessin, et aujourd’hui nous ne sommes plus qu’une poignée à dessiner les astres, à l’ancienne…
Dans cet immense creuset où se forment des étoiles, tout bouge, tout change, mais rien ne se voit en une vie d’homme, et les dessins du 19éme siècle sont identiques à ceux qu’on peut faire aujourd’hui.
Mais quel plaisir quand on est l’observateur, de remettre ses pas dans ceux des grands anciens, de se sentir reliés par-delà les siècles et les lieux à cette litanie d’observateurs qui tous, se sont usés les yeux à essayer de comprendre les astres.