« Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage… »
L’auteur de ces vers, qui inspira une chanson à Brassens, serait-il le mystérieux cavalier enterré dans l’un des deux sarcophages en plomb découvert à Notre-Dame-de Paris l’an dernier ? C’est l’hypothèse d’Eric Crubézy, médecin et professeur d’anthropobiologie à l’université Paul-Sabatier, à Toulouse. Car, pour lui qui l’étudie depuis son exhumation, le squelette est bel et bien celui du poète de la Renaissance Joachim du Bellay. Une conviction acquise sur la base de l’âge de son décès, entre 30 et 40 ans ; de ses pathologies, tuberculose osseuse et méningite chronique ; et de la biographie du poète, neveu de Jean Du Bellay, l’ancien évêque de Paris. La probabilité statistique est donc forte… même si elle reste une probabilité !
C’est la découverte la plus spectaculaire, ou la plus médiatisée, des recherches menées à Notre-Dame après l’incendie d’avril 2019. Mais elle est loin d’être la seule. L’Institut national de recherches archéologiques préventives, l’Inrap, vient d’ailleurs de présenter les principaux résultats des 14 campagnes de fouilles menées depuis 5 ans par une cinquantaine d’archéologues et spécialistes.
Une centaine de sépultures ont été retrouvées, la moitié orientée tête à l’ouest et l’autre moitié orientée tête à l’est. Soit, dans l’usage de l’Église, respectivement des laïcs et des membres du clergé. Sur ce total, 80 sépultures ont été étudiées. Elles abritent en majorité des individus âgés, mais aussi quelques-uns, plus jeunes, et un adolescent. Tous des hommes, à une exception ! Eric Crubézy a d’ailleurs annoncé qu’il s’intéresserait de près à cette unique femme dont on ignore l’identité…
L’Inrap a aussi pu reconstituer les strates successives d’occupation du terrain depuis le 1er siècle, avec des traces d’habitat et d’artisanat, ou encore de l’église romane antérieure au monument gothique de Notre-Dame. Soit 2000 ans d’histoire !
Mais l’autre grande découverte, c’est celle de pièces de l’ancien jubé, la tribune séparant le chœur liturgique de la nef, qui ont conservé leurs splendides peintures polychromes. Seule une quinzaine de fragments de cette cloison construite vers 1230 avaient été retrouvés par Viollet-Le-Duc, en 1858. Lors de ces nouvelles fouilles, plus de mille fragments l’ont été, dont 700 ont conservé leur polychromie, feuilles d’or incluses, et ont fait l’objet de mesures d’urgence de conservation. Pour en découvrir certaines, rendez-vous au Musée de Cluny, à Paris, dès le mois de novembre, où elles feront l’objet d’une exposition.