Bonjour et bienvenue dans le Journal des sciences pour un nouveau tour d’horizon de l’actualité scientifique. Au programme d’un numéro très animalier :
- Des lémuriens à la diète
- Une caméra inspirée du Morpho
- Des rhinos aidés par l’astrophysique
- Une hydrolienne proche de l’anguille
Des lémuriens à la diète
Manger équilibré et en petite quantité serait un gage de longévité et de bonne santé. Une équipe du CNRS et du Muséum national d'histoire naturelle vient d'en faire la démonstration sur une population de microcèbes, un petit lémurien qui présente bien des similitudes physiologiques avec l’Homme.
Depuis 2006, une équipe composée de chercheurs du CNRS et du Muséum national d'histoire naturelle scrute attentivement une population de 34 microcèbes élevés en captivité. Ils surveillent leur régime alimentaire et observent leur état de santé.
Depuis qu'ils sont adultes, ces 34 lémuriens font en effet l'objet d'un régime équilibré strict : la moitié reçoit une ration quotidienne d'une vingtaine de grammes, ce qui est un apport alimentaire normal pour ce tout petit animal, tandis que l'autre moitié consomme quotidiennement 30% de calories en moins.
En captivité, l'espérance de vie d'un microcèbe est d'environ 6 ans. Or, les chercheurs ont constaté que ceux exposés à une restriction calorique chronique vivaient plus longtemps : leur survie médiane est supérieure à 9 ans.
Aujourd'hui, plus de 11 ans après le début de l'expérience, un tiers d'entre eux est toujours vivant, alors que les lémuriens ayant mangé à leur faim sont tous morts.
En outre, les lémuriens à la diète vieillissent en bonne santé : ils ont moins de cancer, moins de diabète, et moins de signes extérieurs du vieillissement comme le blanchiment de la fourrure ou la cataracte (photos). Le seul organe à avoir souffert du régime est le cerveau, avec une fonte plus rapide de la matière grise, mais sans incidence sur les capacités cognitives de l’animal.
Pour ces microcèbes comme pour les mouches, les vers, les souris et quelques macaques, la restriction calorique chronique serait donc le gage d’une vie plus longue et en meilleure santé.
Une caméra inspirée du Morpho
Lorsque les chirurgiens opèrent une tumeur, ils s’efforcent d’enlever tout le tissu malade. Mais il n’est pas toujours simple d’en identifier les limites. C’est pour rendre plus fiable et plus simple le travail des chirurgiens en oncologie qu’un prototype de caméra inspirée de l’œil d’un papillon vient d’être mis au point.
Cette minuscule caméra mise au point par une équipe de chercheurs américains s’inspire de l’œil du Morpho. Grâce à ses nanostructures spécialisées, l’œil de ce papillon est capable de discerner des images multi-spectrales, y compris dans le proche infrarouge invisible à l’œil humain. Or les tumeurs, en réagissant avec certains révélateurs donnés aux patients, émettent précisément des signaux infrarouges.
La caméra est reliée à une paire de lunettes portée par le chirurgien, ce qui lui permet de localiser le tissu cancéreux de manière très précise. Et ce, même à travers d’autres tissus, donc sans vision directe. Cela présente deux avantages. Identifier un fragment tumoral non visible à l’œil nu, d’une part. Être plus précis et donc réduire la taille de l’incision, d’autre part.
Ce prototype a déjà été testé avec succès sur des souris, mais aussi sur des femmes souffrant d’un cancer du sein. Il est plus compact, plus sensible et plus précis que les autres instruments disponibles ayant la même fonction. Il est aussi bien meilleur marché : environ 200 dollars la paire de lunettes, contre cent fois plus pour les autres options. Il pourrait donc être facilement intégré durant les opérations.
Des rhinos aidés par l’astrophysique
Vous avez sans doute entendu que le dernier rhinocéros blanc du Nord était mort au Kenya au mois de mars. Pour mieux protéger les rares rhinocéros blancs du Sud encore en vie, et d’autres animaux menacés, une collaboration peu ordinaire entre astrophysiciens et écologistes anglais vient de voir le jour.
Afin de mieux protéger les espèces les plus menacées du monde, comme les orang-outangs ou les rhinocéros blancs, il faut pouvoir surveiller de grands territoires, y compris la nuit, et traiter les données le plus rapidement possible. C’est l’objet de la collaboration toute récente entre astrophysiciens et écologistes de l’université John Moores de Liverpool.
Pour cela, l’équipe a recours à des drones équipés de caméras thermiques infrarouges. Ils peuvent ainsi détecter les animaux grâce à leur chaleur corporelle, de jour comme de nuit, et même lorsqu'ils sont camouflés dans leur environnement naturel.
Mais comment reconnaître une espèce particulière, compter les animaux, ou encore indiquer une présence humaine anormale, autrement dit, un braconnier en pleine action ?
Les astrophysiciens ont mis au point des algorithmes d'apprentissage automatique et des outils de détection astronomique. Après un premier projet pilote pour tester le concept avec des images infrarouges de vaches et d'humains, l'équipe a travaillé avec deux zoos anglais pour construire des bibliothèques d'images afin d’aider le logiciel à reconnaître différents types d'animaux dans différents types de paysage et de végétation.
L’équipe débute aujourd’hui la phase d’essais grandeur nature, et ce sont les lapins riverins, une espèce menacée d’Afrique du Sud, qui bénéficie en avant-première de cette toute nouvelle technologie.
L’ondulation source d’énergie
Avec l’appui scientifique de l’Institut français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer débute ce mois-ci une campagne d’essai pour un nouveau type d’hydrolienne. Son but : démontrer que l’ondulation semblable à celle d’un poisson peut être source d’énergie.
Dans les bassins de l’Ifremer à Boulogne-sur-Mer, dans les Hauts-de-France, la société Eel Energy a développé un système de production d’électricité d’un nouveau genre : l’hydrolienne à membrane ondulante.
Cette technologie s’inspire du mouvement d’ondulation de certains poissons, comme la raie ou l’anguille. L’ondulation provoquée par les courants marins, en effet, est capable de déformer une membrane. Cela génère de l'énergie qui peut être transformée en électricité grâce à des convertisseurs.
La membrane conçue par Eel Energy est une sorte de grande nageoire, faite de fibres de carbone recouvertes de caoutchouc.
Après un premier essai en bassin, un prototype à l’échelle un-sixième a été testé en rade de Brest au mois d’avril. Pour ce test, l’hydrolienne a été traînée par un bateau mais à l'avenir, elle sera ancrée à un endroit fixe, proche des côtes, avec des courants constants et d’importantes marées. L’ouest de la France recèle de nombreux endroits où ces hydroliennes ondulantes pourraient être installées.