Ce clignement des yeux, ce poisson est l’un des seuls à le pratiquer. Il est aussi l’un des seuls à pouvoir survivre à l’air libre, dès lors qu’il reste mouillé. Il respire alors à travers sa peau et des membranes couvrant sa gorge et sa bouche, à la manière des amphibiens. C’est un Oxudercinae, un membre d’une sous-famille proche des gobies. Et pour les chercheurs, il est devenu un parfait sujet d’étude afin d’en apprendre plus sur l’histoire évolutive du clignement des yeux. En effet, la quasi-totalité des animaux se déplaçant à l’air libre clignent des yeux, pour les hydrater et les nettoyer. Mais chez les poissons, l’eau qui les immerge s’en charge très bien. Le clignement des yeux ne survient donc pas. En revanche, les Oxudercinae, eux, peuvent passer jusqu’aux trois-quarts de leur vie à l’air libre. Et quand ils font un tour sur la terre ferme, ils « clignent » : leurs yeux exorbités se rétractent un instant dans leur orbite, où ils sont recouverts par une membrane appelée membrane dermale. S’agit-il là d’une version primitive de notre clignement et de nos paupières ? Comment ce réflexe est-il apparu ? En comparant l’anatomie des Oxudercinae à celle de poissons proches, mais ne s’aventurant pas sur terre, une équipe de chercheurs a pu constater que si la membrane dermale leur est bien unique, les muscles qu’ils utilisent pour cligner existent déjà chez leurs cousins aquatiques. Les chercheurs ont ensuite voulu savoir si ces poissons clignent des yeux pour les mêmes raisons que nous. Et en les exposant à des courants d’air et à des particules irritantes, ils ont pu constater qu’effectivement, eux aussi clignent des yeux pour les garder mouillés et pour les nettoyer. Mais attention, une différence importante est qu’eux ne possèdent ni glande, ni canal lacrymal. Ils n’ont donc pas la faculté de « fabriquer » leur propre hydratant. Mais c’est justement parce que leur adaptation à la vie terrestre n’est pas aussi avancée et complexe que la nôtre que le cas des Oxudercinae est aussi intéressant. Il permet d’observer directement la façon dont un animal qui, à l’échelle du vivant, était encore récemment aquatique dont un animal qui, à l’échelle du vivant, était encore récemment aquatique s’adapte à la vie sur terre. Et en l’occurrence, il permet de comprendre le rôle crucial que le clignement des yeux joue dans ce processus, en plus de suggérer la façon dont il a évolué à partir d’une anatomie qui n’intégrait pas ce réflexe.
Réalisation :
Clément Lepape
Production :
Universcience
Année de production :
2023
Durée :
2min34
Accessibilité :
sous-titres français