Pourquoi chez-vous ? Christelle Monville – Professeur biologiste à Istem - Genopole
Moi je m’intéresse aux cellules qui sont pigmentées de l’œil, c’est-à-dire celles qui sont noires, qu’on voit à l’arrière de l’œil. Et ces cellules, elles sont un petit peu les baby-sitters des autres cellules de l’œil qui, elles, sont capables de transformer la lumière en images. Et donc, ces baby-sitters, ce sont des cellules qui sont accrochées les unes aux autres, elles ressemblent un petit peu à un nid d’abeilles, et quand elles se décrochent parce qu’il y a une maladie, cela va entraîner la dégénérescence, la mort des cellules responsables de la vision. Et donc, ce nid d’abeilles, cette collaboration qu’il y a entre ces cellules de l’œil, ça me fait penser à la collaboration absolument indispensable des chercheurs entre eux, qui vont échanger des idées et qui vont pouvoir faire progresser la recherche grâce à leur échange. Quand on parle de communauté scientifique, cela a un véritable sens, la communauté biologique, mais aussi différentes communautés scientifiques. Et tout ça construit le travail fondamental qu’on fait dans notre laboratoire à petite échelle et l’étape d’après qui est celle qu’on touche du doigt là, maintenant, qui est : on peut apporter une nouvelle thérapeutique aux patients. C’est la première fois finalement que mes recherches amènent à une thérapeutique possible. Et c’est très excitant et en même temps ça fait un peu peur de se tromper. Je crois que l’émotion, alors pour l’instant, je ne l’ai pas encore vécue, mais j’espère la vivre bientôt, c’est le moment où le produit est vraiment chez le patient et que le patient va bien. J’espère connaître cette émotion et je pense que ça va remuer les tripes de se dire : « Effectivement, ça marche, on y est et on peut concrétiser, ça y est, c’est du concret. » C’est vrai que souvent, on essaie d’utiliser peut-être des analogies visuelles ou des choses un peu pratiques de la vie quotidienne. Quand une cellule a besoin d’énergie par exemple pour faire une fonction, c’est comme quand on est à vélo, il faut pédaler pour remonter la pente. Et puis quand on n’a pas besoin d’énergie, on est dans l’autre sens de la pente, on se laisse aller sur le vélo donc on essaie comme ça… on teste aussi un petit peu vis-à-vis des étudiants, vis-à-vis du public, l’image qui va marcher mieux qu’une autre. Après ça devient aussi un exercice « mental », ça va permettre des fois de simplifier un petit peu l’explication et du coup, d’ouvrir sur la discussion. Le langage du chercheur des fois paraît un peu abscons. Moi je travaille sur des maladies génétiques qui touchent finalement peu de personnes, c’est 40 000 personnes en France, ça peut paraître pas beaucoup. Et en fait, on s’est aperçu en travaillant, que les recherches qu’on était en train de développer pour essayer de soigner ces maladies génétiques pouvaient ouvrir sur des maladies beaucoup plus fréquentes qui vont toucher plusieurs milliers, millions de personnes. On s’aperçoit que de travailler sur la petite protéine, la cellule, le mécanisme moléculaire un petit peu particulier, souvent on s’aperçoit que ce mécanisme moléculaire qu’on croyait réservé à une cellule ou à un fonctionnement, en fait, il est ailleurs.