Ce jour-là, il a commencé par découper une fine lamelle de bois de hêtre : quinze microns, le tiers de l’épaisseur d’un cheveu.
Puis il a imbibé ce confetti de parchemin dans une solution de safranine, qui teinte la lignine, et de bleu astra, qui révèle la cellulose.
Enfin, il a glissé la préparation translucide sous l’œil du microscope.
Et comme souvent, ce qu’il a vu était beau.
Mais il a aussitôt chassé ce sentiment qui menaçait de le submerger, pour se concentrer sur son étude : la compréhension et la maîtrise du fonctionnement des cellules qui donnent à l’arbre sa force et son « intelligence » organique, lui permettent de maintenir son tronc ou ses branches, de se redresser après un accident, de se réorienter pour chercher la lumière
Et puis, comme par hasard, une image a surgi dans l’oculaire, là où il ne cherchait rien.
Une image sans aucune finalité, mais dont le dessin, la forme, les couleurs évoquaient à la fois un cœur, un vitrail, un bijou, une cité, un soleil, un tableau vu dans un musée… Comme un écho de notre monde dans l’univers de l’infiniment petit.
Alors, émerveillé, il a oublié sa quête, et capturé l’image.
À cet instant, le chercheur est devenu artiste.
Coupe transverse de hêtre
Microscopie optique
Bruno CLAIR
Laboratoire de Mécanique et Génie Civil
LMGC Montpellier
(CNRS/Université Montpellier 2)