Pourquoi chez-vous ? Myriam Pannetier – Physicienne au CEA
J’ai un oncle qui était chercheur en physique, à Grenoble. Et je ne connaissais encore rien à la physique, je ne sais pas, je devais avoir peut-être onze ou douze ans. Et il m’a montré son laboratoire et il a fait une expérience qui est de renverser de l’azote liquide, c’est liquide mais ça devient un gaz au contact de l’air et de la température ambiante et en fait, ça roule, ça fait des espèces de petites bulles qui roulent le long du sol. Et puis ça s’évapore, donc il ne reste rien, ça ne mouille pas le sol. Et ça, ça m’avait vraiment fascinée. Il y avait cette espèce de magie d’un phénomène qu’on ne comprend pas nécessairement et qui est assez beau finalement. Et à côté de ça, il y avait la maîtrise d’une instrumentation pour aller comprendre le phénomène derrière. Et à ce moment-là, mais vraiment c’était ce jour-là, je me suis dit : « Quand je serai grande, je serai chercheur ». Ce que je fais en recherche actuellement, c’est de fabriquer des capteurs magnétiques de très petite taille pour aller interroger la signature magnétique des neurones. Et ensuite, je vais le transmettre à des gens qui vont l’utiliser pour se poser d’autres questions. Alors les images mentales, c’est comme ces choses que font les enfants, c’est-à-dire qu’ils tracent un point à un autre. On a un certain nombre de points. Parfois, il y a des points qui s’allument et on a envie de tracer une ligne entre les deux. On sent qu’il peut y avoir quelque chose qui va se dessiner. Alors quelque fois, ça n’aboutit à rien. Toutes ces petites illuminations ne sont pas forcément sources d’idées qui sont constructives. Mais en tout cas, cela suscite l’envie de relier des choses qu’on n’avait pas reliées avant parce qu’on ne les avait pas fait apparaître dans le paysage au même moment. Ça s’allume quand même un petit peu quand il y a une forme de silence. Ou bien évidemment quand on est dans le dialogue avec quelqu’un d’autre. Et l’autre va réagir avec sa propre expérience, sa propre culture. Et parfois, il va entendre les choses un peu différemment de la façon dont il les a dites. Et aussi de cette différence peut naître quelque chose de nouveau. La notion du réel, elle est importante parce que le réel, il a ses propres mécanismes et finalement, c’est ça qu’on essaie d’approcher. Je trouve que quelque part c’est inépuisable, finalement, et il peut y avoir peut-être chez certains le sentiment justement que cet infini est un peu écrasant. Moi, au contraire, je le trouve très rassurant. Il y a évidemment toujours la méthodologie qui nous trace un chemin et qui permet justement d’avancer malgré le doute. Et puis il y a des moments de grâce. Ce moment où on a l’impression qu’il y a un voile qui se déchire et qu’il y a quelque chose qui apparaît. C’est peut-être le mécanisme de récompense qui fait qu’un chercheur continue à avancer dans son tunnel. Et moi, dans les moments que j’ai vécus comme ça, je les ai partagés parce que c’était du travail d’équipe. Il y a avait ce moment vraiment collectif avec le même sentiment qui était juste un sentiment de joie pure par rapport à quelque chose qui se laisse entre-apercevoir. Et ça, c’est vraiment magique.
Réalisation :
Geneviève ANHOURY
Production :
Ex Nihilo avec la participation d'Universcience
Année de production :
2016
Durée :
3min30
Accessibilité :
sous-titres français