Mieux évaluer l'impact de l'éolien sur la biodiversité pour le réduire
Publié le - par Le Blob.fr, avec l'AFP
Développer l'éolien pour contrer le changement climatique, sans pour autant mettre en danger oiseaux, chauve-souris ou animaux marins : ONG, promoteurs et chercheurs veulent résoudre cette équation, alors que le développement de cette énergie renouvelable suscite des crispations. Les Français devraient consommer plus d'électricité d'ici 2050.
Pour répondre à cette demande, il faudra développer fortement les énergies renouvelables, dont l'éolien terrestre et en mer, calcule le gestionnaire du réseau électrique RTE. Mais l'essor des champs d'éoliennes suscite des oppositions pour des questions esthétiques, de bruit ou pour l'impact potentiel sur les animaux, oiseaux et chauves-souris sur terre, ou sur la faune marine pendant la phase de construction.
Les champs d'éoliennes ont des « impacts sur la biodiversité que nous devons maîtriser », a reconnu Nicolas Wolff, président de France Energie Eolienne (FFE) qui regroupe la filière en France, lors d'un séminaire organisé mercredi et jeudi par la Ligue de protection des oiseaux (LPO) à Paris. Une première réponse est de « planifier le développement de l'éolien pour que soient préservés les sites d'importance pour les oiseaux et les chauves-souris », plaide le président de la LPO, Allain Bougrain-Dubourg.
Haltes de migration
« Les éoliennes sont des sources de mortalité très hétérogènes » selon les endroits où elles se situent, explique Geoffroy Marx, responsable des programmes énergie renouvelable et biodiversité à la LPO. Le gouvernement a récemment chargé les préfets de cartographier les zones propices à l'installation d'éoliennes, avec un premier retour attendu fin novembre.
Concernant les oiseaux migrateurs, « c'est problématique quand les éoliennes sont installées à proximité d'espaces de halte de migration », plus encore que dans les couloirs de migration qui peuvent être très larges, souligne Geoffroy Marx. Pour lui, les projets les plus problématiques sont souvent les plus anciens, dont certains installés dans des zones Natura 2000. EDF a ainsi été condamné par la justice pour la destruction de faucons crécerellettes, une espèce protégée, dans le parc d'Aumelas (Hérault) qui date des années 2000.
Des chercheurs travaillent à mieux comprendre les causes de la mortalité aviaire dans les parcs éoliens terrestres et à mesurer l'efficacité des méthodes de détection et d'effarouchement des oiseaux dans le cadre d'un programme, MAPE. « Jusqu'à présent, c'était évalué au doigt mouillé », explique Olivier Duriez, maître de conférence à l'université de Montpellier.
Il s'agit à présent « d'évaluer la surmortalité causée par les éoliennes sur 30 ans » sur différentes espèces d'oiseaux, sachant que pour certaines, « une seule mort par an peut mettre en péril l'espèce ».
Les hics
Pour éviter les collisions, des parcs éoliens peuvent être équipés de caméras et/ou de radars. Dans certains cas, des humains peuvent servir de sentinelles. Il s'agit de déclencher des dispositifs d'effarouchement sonores ou visuels ou d'arrêter les pales. Mais il y a des hics : « Les évaluations des caméras sont faites dans des conditions optimales » météorologiques, alors que la pluie ou les nuages peuvent avoir un impact sur leur fonctionnement, indique Sophie Dupont, post-doctorante. L'effarouchement « est relativement peu efficace dans la durée » car les oiseaux s'y habituent, poursuit-elle. Et « le temps d'arrêt de la turbine est très long »: souvent l'oiseau n'est pas détecté d'assez loin pour éviter la collision, complète Olivier Duriez.
Les éoliennes en mer suscitent une inquiétude grandissante. La LPO s'interroge sur l'impact cumulé des éoliennes en mer pour les oiseaux migrateurs si les projets se multiplient sur leur parcours. Des pêcheurs normands et bretons ont fait connaître leur mécontentement. En Méditerranée, des opposants demandent un report de l'attribution dès l'année prochaine de deux premiers parcs d'éoliennes flottantes.
Le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) va dans le même sens, jugeant que « nos connaissances des impacts potentiels restent très partielles ». Il recommande « d'appliquer un moratoire dans la mise en oeuvre des projets (nouveaux appels d'offre) afin de laisser le temps au moins aux études en cours ».