L’horizon se dégage pour Ariane 6 : le vol inaugural du lanceur, qui porte les ambitions européennes d’accès indépendant à l’espace, est désormais programmé pour le quatrième trimestre 2023, sous réserve que la campagne d’essais se déroule comme prévu. « C’est une date prévue et le programme devra encore réaliser successivement et en temps voulu un certain nombre d’étapes clés pour que ce calendrier reste valide », a affirmé le directeur général de l’Agence spatiale européenne (ESA) Josef Aschbacher.

Le programme de ce nouveau lanceur, destiné à succéder à Ariane 5 et à remplir les missions auparavant effectuées par la fusée russe Soyouz, avait été lancé en 2014. Initialement prévu pour 2020, le premier vol d’Ariane 6 avait déjà dû être reporté de deux ans en raison de la pandémie de Covid-19 et de certaines difficultés de mise au point.

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Un lanceur Ariane 6 exposé à l'entrée du 73e Congrès international d'astronautique au Palais des congrès de Paris, le 18 septembre 2022. © AFP Emmanuel Dunand

Désormais, à Kourou, l’intégralité du lanceur a été assemblée sur son pas de tir du Centre spatial guyanais. Cet exemplaire ne volera pas, mais vise à tester l’ensemble des interfaces et les bonnes communications entre le lanceur et son pas de tir. Ces essais doivent également permettre de tester les logiciels de vol, ceux des bancs de contrôle, ainsi que les opérations de remplissage et vidange des réservoirs. Ils impliquent aussi la mise à feu du moteur Vulcain de l’étage principal à plusieurs reprises, dont une de plus de 8 minutes correspondant à sa durée d’utilisation en vol.

Parallèlement, sur le site de l’agence spatiale allemande (DLR) à Lampoldshausen, la campagne de tests au sol de l’étage supérieur réallumable — principale innovation du futur lanceur — a commencé début octobre. Cette campagne a lieu avec plus d’un an de retard en raison de difficultés rencontrées dans la mise au point des instruments de mesure qui équipent les bancs d’essais.

Les essais visent à tester le moteur Vinci et un autre élément clé de l’étage supérieur, l’APU, l’unité de puissance auxiliaire. Ce petit moteur permet d’alimenter en carburant le moteur Vinci pour le rallumer et ainsi de déployer plusieurs satellites d’une constellation au cours d’une même mission. Le moteur Vinci a été mis à feu « pendant 45 secondes comme prévu », a affirmé André-Hubert Roussel, président d’Arianegroup, le maître d’œuvre industriel. Jusqu’à trois mises à feu sont prévues, selon lui.

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Caractéristiques techniques du prochain lanceur européen Ariane 6, destiné à remplacer Ariane 5 à partir du dernier trimestre 2023 © AFP

Ariane 6, qui aura coûté près de 4 milliards d’euros, doit notamment permettre à l’Europe de s’adapter à la féroce concurrence de l’américain SpaceX et de répondre à l’essor des petits satellites et constellations : environ 18 500 satellites de moins de 500 kilos doivent être lancés au cours des dix prochaines années, soit l’équivalent d’une tonne par jour, selon le cabinet spécialisé Euroconsult.

La fusée est prévue pour être 40 % moins coûteuse qu’Ariane 5 et surtout plus polyvalente. Une version à deux propulseurs latéraux (boosters), Ariane 62, lui permettra d’avoir la capacité d’emport de la fusée russe Soyouz, dont les tirs depuis la Guyane ont été interrompus par l’invasion de l’Ukraine. Une autre à quatre boosters remplacera le lanceur lourd Ariane 5. Une fois le premier vol passé, 29 lancements sont déjà prévus pour Ariane 6, dont 18 pour déployer des satellites de la constellation Kuiper du géant Amazon.