La Chine s’élance vers la planète rouge
Publié le - par LeBlob.fr, avec l’AFP
La Chine à l’assaut de Mars : le géant asiatique a lancé jeudi avec succès une sonde qui va parcourir un long voyage jusqu’à la planète rouge, en pleine rivalité diplomatique et technologique avec les États-Unis.
L’engin a été propulsé dans un ciel d’azur par une fusée Longue-Marche 5, la plus puissante de la panoplie chinoise, qui a décollé dans un nuage de fumée du centre de Wenchang, sur l’île tropicale de Hainan (sud). Sous une température écrasante de 34 degrés, des ingénieurs et employés en blouse bleue ont applaudi tout sourire après le tir. L’agence spatiale a confirmé une demi-heure plus tard la réussite du lancement. La sonde doit arriver dans l’orbite de Mars en février 2021. Elle devra d’abord effectuer en quelque sept mois le long trajet Terre-Mars : une distance d’environ 55 millions de kilomètres – soit 1 400 fois le tour du monde.
Ambitieuse, la Chine espère faire lors de cette première tentative indépendante presque tout ce que les États-Unis ont réalisé en plusieurs missions martiennes depuis les années 1960. C’est-à-dire placer une sonde en orbite, poser un atterrisseur, puis en faire sortir un robot téléguidé afin qu’il analyse la surface martienne. « C’est manifestement un événement marquant pour la Chine. C’est la première fois qu’elle s’aventure au loin dans le système solaire », indique Jonathan McDowell, astronome au Centre Harvard-Smithsonian pour l’astrophysique, aux États-Unis. « Si elle réussit, ce serait la première fois dans l’histoire qu’un atterrisseur et un robot téléguidé non américains fonctionnent sur Mars », souligne Chen Lan, analyste pour le site GoTaikonauts.com, spécialisé dans le programme spatial chinois.
Mai 2021
La mission est nommée « Tianwen-1 » (« Questions au ciel-1 ») en hommage à un poème de la Chine ancienne qui traite d’astronomie. Elle offre un certain regain de prestige à Pékin face à Washington, qui vient d’ordonner la fermeture du consulat de Chine à Houston, dernier avatar de l’intense rivalité entre les deux géants du Pacifique. « Nous menons cette mission d’exploration de Mars en utilisant l’espace à des fins pacifiques et avec l’ambition de percer ses mystères », a déclaré à la presse Liu Tongjie, le porte-parole de Tianwen-1. « Le but n’est pas de s’engager dans une compétition avec d’autres pays », a-t-il tenu à souligner.
Le robot à roues devrait atterrir sur Mars en mai 2021. D’un poids de plus de 200 kilos, il est équipé de quatre panneaux solaires et est censé être opérationnel durant trois mois. Parmi ses missions : conduire des analyses du sol, de l’atmosphère, prendre des photos, ou encore contribuer à la cartographie de la planète rouge.
La Chine a déjà une expérience en la matière : elle a fait rouler deux petits robots sur la Lune, les « Lapins de jade » 1 et 2 – déposés respectivement en 2013 et 2019. Mais la distance Terre-Mars est 140 fois plus importante que le trajet Terre-Lune. Conséquence : une plus grande lenteur des télécommunications et un voyage plus long, durant lequel des défaillances peuvent survenir.
« Difficultés considérables »
Le pays asiatique n’est pas le seul à profiter de l’actuelle distance réduite Terre-Mars pour propulser une sonde vers la planète rouge : les Émirats arabes unis ont lancé la leur lundi et les États-Unis doivent faire de même le 30 juillet. Les objectifs de la Chine avec cette mission sont « les mêmes que ceux de nombreuses nations spatiales », déclare à l’AFP Carter Palmer, spécialiste de l’espace au cabinet américain Forecast International. « L’exploration spatiale est une source de fierté nationale. L’ambition est également d’améliorer les connaissances de l’humanité vis-à-vis de Mars. » La Chine investit des milliards d’euros dans son programme spatial, afin de rattraper l’Europe, la Russie et les États-Unis. Elle a envoyé son premier astronaute dans l’espace en 2003. La Chine lance également des satellites pour elle-même ou pour le compte d’autres pays. Elle vient d’achever en juin la constellation de son système de navigation Beidou – rival du GPS américain.
Le géant asiatique prévoit par ailleurs d’assembler une grande station spatiale d’ici 2022. Et il espère envoyer des hommes sur la Lune d’ici une dizaine d’années. La Chine avait déjà essayé sans succès une sonde vers Mars en 2011 lors d’une mission commune avec la Russie. La chance sera-t-elle au rendez-vous cette fois-ci ? « Les risques et les difficultés sont considérables », notamment le périlleux atterrissage sur Mars, note Liu Tongjie. « Mais nous sommes très confiants. »